L’approche pédagogique de l’éducation à la démocratie de Charlene O’Hanley’s est aussi unique que le contexte dans lequel elle enseigne.

Enseignante depuis 30 ans, O’Hanley a récemment pris sa retraite avant de retourner dans l’école où elle avait enseigné pendant deux décennies, un centre d’éducation aux adultes d’anglais langue seconde à Lachute, au Québec.

Lachute, une ville dont la population est majoritairement anglophone, est l’une des régions du Canada où les revenus sont les plus faibles et où le taux de diplomation secondaire est l’un des plus bas au pays.

Les élèves de O’Hanley proviennent de différents horizons et elle leur donne toutes les chances de développer leur sentiment du pouvoir d’action.

« Je suis de nature très optimiste et j’espère que ces élèves, qui viennent de milieux défavorisés, qui ont eu recours à l’aide sociale et qui n’ont pas beaucoup rêvé ou pensé qu’ils pourraient atteindre leurs objectifs, viendront dans cette petite école, se découvriront une passion pour quelque chose et réaliseront qu’ils peuvent faire une différence », explique-t-elle.

O’Hanley est fière d’une récente réalisation menée par ses élèves, la création de l’Alliance Gray-Straight, qui s’accompagnera d’un local que les élèves pourront utiliser, grâce au financement d’une petite subvention. « Nous avons rédigé une belle proposition sur ce que nous voulions pour notre école et nous venons d’apprendre que notre demande avait été acceptée, ce qui nous réjouit beaucoup », raconte-t-elle.

Le Centre de développement des compétences (CDC) de Lachute est un petit centre, comptant seulement deux enseignant.e.s et 30 élèves, dont l’âge varie de 16 ans à plus de 60 ans. O’Hanley est probablement la seule enseignante qui peut dire qu’elle a eu une grand-mère et une petite-fille dans sa classe… en même temps!

Dans les dernières années, elle a constaté un changement dans l’âge de ses élèves. Il y a de moins en moins d’adultes plus âgé.e.s qui reviennent pour obtenir leur diplôme d’étude secondaire, mais de plus en plus d’adolescent.e.s qui s’inscrivent, car iels n’ont pas réussi à s’épanouir dans le système régulier.

« Maintenant, il s’agit davantage d’une école alternative », dit-elle. « L’éducation aux adultes attire beaucoup d’élèves artistiques. J’ai plusieurs auteurs et musiciens, et de vrais artistes. Pour une raison ou une autre, ils n’entraient pas dans le moule. »

Le CDC offre aux élèves une grande liberté de choix, qu’il s’agisse de leur emploi du temps ou de la priorité accordée aux matières, la possibilité de créer des projets, ou encore de faire du bénévolat, pour obtenir des crédits supplémentaires. D’ailleurs, O’Hanley considère le bénévolat comme fondamentalement démocratique et comme une occasion de renforcer les valeurs démocratiques auprès des élèves.

Je suis de nature très optimiste et j’espère que ces élèves, qui viennent de milieux défavorisés, qui ont eu recours à l’aide sociale et qui n’ont pas beaucoup rêvé ou pensé qu’ils pourraient atteindre leurs objectifs, viendront dans cette petite école, se découvriront une passion pour quelque chose et réaliseront qu’ils peuvent faire une différence.


Alors qu’elle enseignait l’histoire autrefois, ce cours a été supprimé du programme de formation général des adultes. Depuis, elle enseigne donc l’anglais langue seconde et incorpore l’éducation civique aussi souvent qu’elle le peut. Les compétences en matière d’écoute et de débat doivent être évaluées, c’est pourquoi elle organise souvent des discussions sur des sujets de l’actualité, faisant ainsi de l’éducation à la démocratie au quotidien.

O’Hanley se souvient d’une fois ou l’aide médicale à mourir faisait débat au Parlement. Ses élèves en ont donc discuté, elleux aussi, en classe. La différence d’âge entre ses élèves a augmenté la tension de la discussion, mais l’a aussi enrichi.

« J’avais des élèves un peu plus âgé.e.s qui avaient des opinions très différentes, et peut-être un peu plus réfléchies que celles de jeunes impétueux.euses de 16 ans », dit-elle. « Les plus jeunes disaient : “Laissez-nous faire ce qu’on veut, c’est notre corps, notre choix.“ Ils ne voulaient pas vraiment entendre parler de l’argument de la pente glissante que les élèves plus âgé.e.s essayaient d’aborder. »

« La discussion s’est un peu animée, mais tout s’est bien passé, car nous n’avons pas essayé de faire changer les autres d’avis. Nous avons simplement exprimé nos propres pensées et vu le résultat. En fin de compte, je crois que nous avons donné matière à réflexion aux plus jeunes. »

Parmi les différentes activités qu’elle a menées, O’Hanley a emmené un groupe d’élèves dans un voyage mémorable à Ottawa pour assister à la présentation du budget fédéral, après avoir reçu une invitation de CIVIX.

« C’était vraiment quelque chose, parce que certains de nos élèves n’étaient jamais sortis de Lachute, donc d’aller à Ottawa était énorme », raconte-t-elle. « Ils ont été impressionnés par les politiciens. Justin Trudeau y était, et de le voir en personne, c’était vraiment quelque chose. C’est à ce moment-là que nous avons fait de l’histoire et que nous avons parlé de Pierre Elliott Trudeau, puis de la façon dont son fils a pris la relève. C’était significatif pour eux. »

O’Hanley, qui utilise les programmes de CIVIX depuis 2012, considère que les programmes d’éducation civique sont essentiels pour inciter les élèves à devenir des citoyen.ne.s.

« Ils donnent une voix aux élèves qui se demandent peut-être “Pourquoi devrais-je voter? Quelle différence cela fait?”, mais j’en reviens toujours à leur rappeler que les actions d’une seule personne peuvent changer la vie des autres », dit-elle. « Ils ne réalisent pas la différence qu’une seule personne peut faire. J’essaie de leur inculquer qu’ils peuvent se rendre sur le terrain et créer le monde qu’ils souhaitent. »

En Bref

NOM: Charlene O'Hanley

LIEU: Lachute, Quebec

ANNÉES SCOLAIRES ENSEIGNÉES: Éducation secondaire et formation des adultes

MATIÈRES ENSEIGNÉES: Anglais langue seconde

NOMBRE D'ANNÉES D'ENSEIGNEMENT: 30

NOMBRE D'ANNÉES IMPLIQUÉES AUPRÈS DE CIVIX: 12

PROGRAMMES DE CIVIX MIS EN ŒUVRE: Vote étudiant, Consultations budgétaires auprès des élèves et Salut l’élu.e

MOTIVATION PRINCIPALE: « Contribuer à créer un monde meilleur et plus inclusif. Je veux que les gens soient meilleurs et fassent mieux, parce que nous sommes égaux. Personne n’est meilleur qu’un autre. »